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dimanche 24 avril 2016

Réciprocités faulknériennes



Lorsque qu'un livre s'intitule "William Faulkner, sa vie et son oeuvre", il est permis de craindre le pire. A tort pour ce qui est de l'ouvrage de David Minter (1). Les péripéties de la vie de Faulkner viennent en contrepoint d'explications sur le genèse des nouvelles et romans, apportant des précisions intéressantes. Sans être du niveau de l'ouvrage de André Bleikasten (2), voilà une biographie agréable à lire, une bonne introduction pour qui voudrait entrer en douceur dans l'univers torturé de Faulkner.

"Ma perspective dans ce livre est double. D'une part, je raconte la vie de Faulkner et tente d'en traduire le sens ; de l'autre, je discute de ses écrits, publiés ou inédits, en essayant de les éclairer. Mais je n'ai pas voulu faire de cet ouvrage une somme de nouvelles informations sur la vie de Faulkner [...] C'est donc d'un point de vue particulier que je sollicite ici l'attention du lecteur ; cela tient à l'histoire que je tente de raconter -histoire des profondes réciprocités entre la vie mal réussie de Faulkner et ses chefs-d'oeuvre, de leurs relations et de leurs mutuelles remise en cause" (Préface).

1- David MINTER, William Faulkner, sa vie et son oeuvre, Balland, 1984
2- André BLEIKASTEN, William Faulkner, une vie en romans, Editions Aden, 2007

samedi 16 avril 2016

Hemingway, es pasado !





"For Whom The Bell Tolls, rédigé après la fin des hostilités et publié en 1940, jette un regard rétrospectif sur la guerre qui se veut « objectif » et équilibré. En fait, comme nous avons essayé de le démontrer ailleurs 26, il n'en est rien : il s'agit d'une vision bien « orientée » du conflit, celle du «compagnon de route » libéral et apolitique que fut Hemingway pendant toute la guerre. Et ceci malgré le célèbre portrait d'André Marty, qui reste justement une exception, ou les passages éparpillés dans le roman qui paraissent critiques vis-à-vis des communistes. A cet égard le compte rendu de D. Macdonald au moment de la parution de l'ouvrage, le point de vue de la dissidente Partisan Review, garde toute son acuité 27. Pertinent aussi est l'essai de l'écrivain espagnol Arturo Barea, qui participa à la guerre et pour qui le roman est peut-être fidèle à Hemingway, mais non à l'Espagne ou à la guerre 28. Ceci malgré des aspects remarquables : Barea reconnaît notamment, à l'instar du grand historien de la guerre Hugh Thomas 29, la véracité avec laquelle Hemingway recrée le milieu de Gaylord's, l'état-major soviétique à Madrid. N'est-il pas intéressant de constater que ce fut peut-être ce plus grand des best-sellers d'Hemingway, à beaucoup d'égards reflet fictif du discours idéologique dominant sur la guerre, qui modela l'image de cette guerre dans l'esprit des générations ultérieures ? Il existe d'autres perceptions de la guerre d'Espagne, certes, mais elles restent en général cachées dans les pages poussiéreuses de textes lus maintenant par les seuls spécialistes."

Sayre Robert. "La guerre d’Espagne : écrivains et écriture aux Etats-Unis". In: Revue Française d'Etudes Américaines, N°55, février 1993. Les années 1930. pp. 43-55.